La Financière de l'Echiquier - Ligne de faille

19/07/2022 - source : Patrimoine 24

La flambée des prix de l’énergie en juin dernier, de fausses rumeurs diffusées dans les marchés la veille de la publication, jusqu’aux allusions à peine voilées de la Maison Blanche : tout laissait imaginer que l’inflation américaine allait une nouvelle fois augmenter au-delà des estimations des économistes. Ce fut le cas.

Enguerrand ArtazLes prix à la consommation ont en effet largement augmenté en juin, dépassant les attentes pour le 2e mois consécutif. De plus, ils connaissent, à +9,1% contre +8,8% anticipé en moyenne, leur plus forte progression annuelle depuis novembre 1981. Sans être tout à fait anecdotique, ce chiffre n’est toutefois pas le plus important. D’une part parce qu’il est notablement impacté par le prix des matières premières, et que la baisse récente des prix de l’énergie – le pétrole a baissé de plus de 20% depuis ses plus hauts niveaux de juin – va certainement entraîner une baisse de l’inflation globale dans les prochains mois. D’autre part parce que si elle ne peut tout à fait ignorer l’impact sur les ménages du coût des carburants ou de l’alimentation, la Réserve fédérale américaine (Fed) se focalise avant tout sur l’inflation sous-jacente, c’est-à-dire l’évolution des prix à la consommation hors énergie et alimentation.

Et sur ce terrain, les nouvelles ne sont pas rassurantes. La baisse de l’inflation sous-jacente pour le 3e mois consécutif – s’établissant à 5,9% en juin contre 6,0% en mai et 6,5% au pic de mars – est en trompe-l’œil. En effet, si l’on décompose cette variation, on observe que les prix ont bien plus progressé au 2e trimestre 2022 (7,8% en rythme annualisé) que lors des trois précédents trimestres (5,3% en rythme annualisé). En réalité, l'apparente baisse de l’inflation sous-jacente n’est due qu’à un effet de base favorable, les prix ayant très fortement augmenté au 2e trimestre 2021 (10,0% en rythme annualisé). Autrement dit, si les prix des biens et services hors énergie et alimentation poursuivent leur trajectoire des trois derniers mois, l’inflation sous-jacente devrait réaugmenter au cours des prochains mois. Une perspective qui ne fait pas vraiment les affaires de la banque centrale.

De plus, les composantes de cette inflation "cœur" donnent elles aussi une image peu rassurante. D’abord, alors qu’ils commençaient à montrer des signes d’inflexion depuis un mois ou deux, les prix de certains biens sont repartis nettement à la hausse en juin, en particulier les équipements domestiques et même les équipements informatiques, pourtant en déflation structurelle. Ensuite, les prix des services sont partout orientés à la hausse, avec en particulier une accélération des coûts des services de santé, sur fond de primes d’assurance élevées. Enfin, les prix du logement continuent de flamber. La composante "loyers" a augmenté de 0,8% en juin, soit sa plus forte variation mensuelle depuis octobre 1982, portant sa variation annuelle au plus haut depuis juillet 1986. Quant à la composante  "équivalent loyer des prix à la propriété", elle a progressé pour sa part de 0,7%, du jamais vu depuis 32 ans, aboutissant à une inflation au plus haut depuis septembre 1990. Des chiffres qui amènent le logement à représenter désormais plus de la moitié (61%) de l’inflation sous-jacente.

Or, le logement fait partie des catégories du panier d’inflation considérées comme les moins volatiles, autrement dit celles sur lesquelles la Fed se doit d’agir en priorité, là où son action est moins déterminante sur des composantes très volatiles comme celles directement liées aux matières premières. Et si un effet saisonnier peut expliquer en partie cette forte accélération – l’entrée sur le marché du logement, à cette période de l’année, des nouveaux diplômés entraînant une indexation massive de ces nouveaux loyers – cela n’en reste pas moins un sujet de préoccupation pour la banque centrale. Celle-ci se trouve donc sur une ligne de faille. D’un côté, l’inflation globale a probablement atteint son pic et devrait ralentir dans les prochains mois, par le recul des prix de l’énergie. De l’autre, l’inflation sous-jacente pourrait réaugmenter, portée notamment par une inflation immobilière qui atteint des records de plusieurs décennies. De la priorité que la Fed donnera à l’une ou l’autre des dynamiques dépendra certainement l’ampleur de son prochain mouvement de hausse des taux : 75bp ou 100bp.

Enguerrand Artaz, Fund Manager

Telex

Morosité chez les petits patrons… :  l’indice de confiance des PME américaines établi par l’enquête NFIB est ressorti sous les attentes pour le mois de juin 2022, tombant à son plus bas niveau depuis janvier 2013. Particulièrement inquiètes de l’inflation et du coût du travail, et témoignant de tensions toujours très fortes sur le marché de l’emploi, les PME font preuve d’un pessimisme rarement vu sur les perspectives d’activité et de ventes, et ce même si elles sont un peu plus nombreuses à nouveau à ne plus anticiper des hausses de prix à moyen terme.

…et chez les investisseurs : pourtant déjà attendu en net recul, le sentiment économique des investisseurs mesuré par l’enquête allemande ZEW ressort largement sous les attentes. Le sentiment sur les perspectives passe sous son niveau de mars 2020 et retombe à son plus bas niveau depuis novembre 2011. On note, dans les sous composantes de l'enquête, une légère baisse de la part des investisseurs – toujours majoritaires néanmoins – qui s'attendent à une baisse de l'inflation à 6 mois. Concernant les Etats-Unis, ils sont un peu plus nombreux à penser que l'inflation va rester stable. Pour la zone euro, c’est le nombre d’investisseurs tablant sur une hausse de l’inflation qui augmente.

Picking de la semaine

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PORVAIR, un premier semestre prometteur

 

L’actu. 

L’entreprise britannique spécialisée dans les systèmes de filtration industrielle a publié un premier semestre 2022 record grâce à une croissance organique de +15%.

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Notre analyse. 

PORVAIR Filtration Group, leader international du développement et de la fourniture de matériaux et de solutions innovantes pour les applications de filtration, affiche un chiffre d’affaires de 180 millions de livre sterling, soit une progression organique de +15%. Le groupe présente également une bonne résilience de sa marge, à 12,7%, qui baisse seulement de 0,4% dans un contexte d’inflation des coûts. La division Aéronautique et Industrie, qui représente près de la moitié des ventes, progresse de +17% à périmètre et taux de change constants, tandis que la marge s’établit à 10,1%. La division Laboratoires – 40% du chiffre d’affaires – connaît quant à elle une progression de +17%, avec une marge qui approche 20%. La  baisse d’activité liée à l’épidémie du Covid est moins forte qu’attendu.

Le business model, peu consommateur de capital, confirme sa pertinence, avec des investissements qui atteignent 2,3 millions de livres sterling, soit moins de 3% du chiffre d’affaires. Le management semble confiant pour l’avenir, notamment grâce à un carnet de commandes très fourni, en hausse mois après mois depuis juin 2020 pour toutes les divisions. Il reste néanmoins prudent face aux risques de récession, le groupe pouvant être confronté à des phénomènes de déstockage violents, de courte durée suivie de  rebonds très rapides. Décorrélées du cycle, les expositions à l’aéronautique (15% du chiffre d’affaires) et à la santé (40%) procurent ainsi beaucoup de résilience au groupe.

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En conclusion. 

La valorisation du groupe britannique ressort entre 15 et 16 fois l’EBITDA 2022, contre une moyenne historique sur 10 ans de 15 fois, et des variations allant de 12 à 21 fois l’EBITDA. Au cours du premier semestre 2022, le groupe a doublé son chiffre d’affaires et sa marge a progressé de 2 points.

 

 

 

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