Vontobel AM - Comment débuter dans l’investissement à impact: réponse à vos questions

23/11/2023 - source : Patrimoine 24

Savez-vous ce que sont les «facilitateurs» en matière d’investissement à impact? Et en quoi l’impact diffère des critères ESG? Pascal Dudle et Marco Lenfers de Vontobel rencontrent régulièrement des investisseurs chevronnés qui souhaitent se lancer dans l’investissement à impact ou y étendre leurs activités. Ils répondent ici aux questions que les investisseurs professionnels et institutionnels posent fréquemment pour construire un avenir meilleur grâce à l’investissement à impact

Vontobel article ISRD’où vient la philosophie de l’investissement à impact?

Pascal: Il devenait de plus en plus évident que le monde ne fonctionnait pas de manière durable. Le changement climatique, la perte de biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles, mais aussi le manque d’égalité et d’inclusion dans la société étaient des problèmes que l’humanité ne pouvait plus ignorer. L’investissement à impact est né de la volonté croissante de changer les choses. Notre société s’est engagée en faveur de ce type d’investissement dès le début, car la famille Vontobel elle-même était déterminée à agir pour un changement positif. Elle a par ailleurs compris que là où il y a des risques, il y a aussi des opportunités. Nous avons lancé notre première stratégie à impact en 2008 et, dès l’année suivante, Vontobel a commencé à acheter des certificats de CO2 pour compenser toutes ses émissions générées par ses activités. Nous voulions montrer l’exemple.

Quel est l’objectif premier de Vontobel? L’impact ou la performance?

Pascal: Pour nous, l’impact et le rendement financier sont tout aussi importants l’un que l’autre. Ils vont de pair, et c’est là tout le fondement de notre approche du «double dividende». Nous pensons qu’une entreprise ne peut avoir un impact dans le monde réel que si ses produits et services sont financièrement rentables. C’est également la raison pour laquelle nous suivons les performances et l’impact d’une entreprise en détail et au fil du temps. Un instantané de sa situation actuelle ne nous permet pas nécessairement de juger si elle a le potentiel d’avoir un impact et d’être financièrement prospère à long terme.

Marco: Pour être clair, nous n’achèterions jamais une entreprise uniquement en raison de son impact, si nous n’étions pas convaincus de son potentiel financier. Et vice-versa. Nous essayons toujours d’adopter une vision holistique, d’examiner les deux côtés de la médaille, ce qui traduit notre volonté de respecter notre concept de «double dividende».

Fixez-vous des objectifs d’impact particuliers pour chaque entreprise ou les définissez-vous au niveau du portefeuille?

Marco: Nous avons des objectifs au niveau de l’entreprise. Chaque position doit contribuer à nos piliers d’impact, qui correspondent tous à au moins un objectif de développement durable. Nous établissons ensuite l’impact global au niveau de l’ensemble du portefeuille. En revanche, nous ne fixons pas d’objectif d’impact spécifique pour un portefeuille particulier, par exemple en matière d’émissions potentielles évitées. Cela pourrait nous amener à investir dans une entreprise uniquement parce qu’elle a un potentiel d’impact, même si nous ne sommes pas convaincus sur le plan financier. Nous adoptons toujours une vision holistique.

Pascal: Bien entendu, nous suivons en permanence les positions et lorsque nous constatons une évolution défavorable, nous entamons un dialogue avec la direction de l’entreprise sur les questions spécifiques que nous avons soulevées. Cela peut se produire à tout moment du cycle de vie de l’investissement et nous permet d’avoir une influence sur le comportement de l’entreprise avant que des problèmes graves ne surviennent.

Il est facile pour la plupart des gens de comprendre l’intérêt qu’il y a à soutenir un producteur d’éoliennes. En revanche, il est plus difficile de comprendre comment une entreprise de semi-conducteurs, par exemple, peut avoir un impact positif. Comment ces entreprises peuvent-elles contribuer à la lutte contre le changement climatique?

Pascal: L’éolien est évidemment facile à comprendre, car il s’agit d’une énergie verte qui remplace des technologies à forte intensité de carbone généralement basées sur le gaz ou le charbon. Et il est relativement facile de calculer l’impact en termes d’émissions de CO2 évitées, etc. Lorsqu’il s’agit d’autres industries telles que les puces électroniques, qui peuvent avoir un impact tout aussi important, nous parlons souvent de «facilitateurs». Il s’agit de technologies qui permettent, par exemple, d’accroître l’efficacité énergétique ou l’intelligence de divers appareils. Je prends souvent l’exemple de la ventilation des bureaux avec mes clients. Autrefois, la ventilation fonctionnait à plein régime toute la journée. Aujourd’hui, des capteurs intelligents ont été mis au point pour faire varier la puissance de la ventilation en fonction du nombre de personnes présentes dans la pièce, ce qui permet de réaliser d’importantes économies d’énergie sur le long terme. Les capteurs intelligents contiennent évidemment des semi-conducteurs de pointe.

Marco: Un autre exemple est celui des voitures qui, au fil des ans, ont été équipées de plus en plus de semi-conducteurs pour optimiser le rendement énergétique, réduire les émissions, etc. Les véhicules électriques (VE) d’aujourd’hui ne pourraient pas rouler sans semi-conducteurs intelligents. Ils «facilitent» donc l’utilisation efficace de la puissance de la batterie et augmentent l’autonomie du véhicule électrique. Dans le cas des semi-conducteurs, l’ensemble de l’industrie déploie également des efforts considérables pour réduire de manière significative la consommation de matériaux et d’énergie nécessaire à la fabrication et au fonctionnement de ses produits.

Que dois-je faire en tant qu’investisseur lorsque je repère une entreprise qui apporte une excellente solution à un problème environnemental ou social, mais qui présente de graves insuffisances en termes de critères ESG dans d’autres domaines?

Pascal: Évaluer une entreprise du point de vue des critères ESG, c’est d’abord l’examiner du point de vue du risque. La perspective de l’impact, quant à elle, porte davantage sur la contribution de l’entreprise au changement dans le monde réel. Si une entreprise se trouve en territoire négatif dans les deux cas, nous ne pouvons pas investir, à moins d’avoir la preuve indiscutable que tous ses investissements sont canalisés vers des solutions nouvelles et plus durables. Mais nous envisagerons d’investir dans une entreprise confrontée actuellement à des problèmes ESG, à condition qu’elle entreprenne un changement stratégique clair en abandonnant ses anciennes pratiques et en investissant dans de nouvelles façons de travailler.

Marco: Nous appliquons une règle d’or: quel que soit son statut, nous n’investissons pas dans une entreprise, à moins que ses activités ne causent pas de dommages majeurs. Il ne faut pas oublier que les entreprises dans lesquelles nous investissons doivent respecter des normes et des réglementations internationales, ce qui les incite à faire preuve de rigueur. En outre, nous fixons nos propres seuils pour les activités liées au charbon et au pétrole ainsi que pour d’autres activités critiques, afin de nous assurer que nous ne nous impliquons pas dans des activités susceptibles de nuire à la planète ou à la société.

Vous privilégiez les entreprises qui ont une stratégie à «forte conviction». Cela ne tend-il pas à abaisser le niveau de diversification de ces portefeuilles?

Marco: Les opportunités offertes par les différents thèmes sont nombreuses en général. D’après notre expérience, depuis que nous appliquons notre stratégie d’investissement, nous disposons d’environ 600 actions dans le domaine de l’environnement, et ce chiffre double si vous y ajoutez les aspects sociaux. Pour un investisseur qui vise à détenir 50 à 70 actions dans son portefeuille, le choix est considérable. S’agissant de la volatilité, les énergies renouvelables et les transports, par exemple, peuvent être très volatils. Mais tous les thèmes ne suivent pas le même schéma. Cela signifie que si vous constituez un portefeuille couvrant différents défis et opportunités, vous avez la possibilité de vous diversifier tout au long du cycle. L’important est de considérer les choses de manière globale, plutôt que de se concentrer sur un seul domaine. Notre stratégie environnementale mondiale illustre l’efficacité de cette démarche. Nous pensons qu’il est possible d’obtenir une diversification et donc de réduire la volatilité sur le marché mondial des actions.

En tant que novice en matière d’investissement à impact, comment puis-je évaluer les références d’un fournisseur et sa compétence dans le domaine? Où puis-je obtenir des informations fiables sur le secteur?

Marco: La bonne nouvelle, c’est que l’autorité de réglementation du secteur a contraint les entreprises à fournir des informations publiques assez détaillées sur la durabilité de leurs activités, dont une grande partie est disponible sur Internet. Le Règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR) de l’Union européenne, par exemple, est axé sur la publication d’informations. La mauvaise nouvelle, c’est que chacun fait les choses différemment, ce qui vous oblige à comparer et à vous forger votre propre opinion. Si je débutais dans ce domaine, je chercherais un fournisseur qui ne soit pas un nouveau venu sur le marché, prenant le train en marche. L’expérience et le dévouement sont absolument essentiels. Vous devez faire appel à des personnes qui opèrent depuis longtemps dans le secteur et qui ont l’expérience nécessaire pour savoir ce qu’elles font.

Pascal: L’autre aspect essentiel est la transparence. Les gestionnaires fournissent-ils uniquement les informations demandées par l’autorité de réglementation ou vont-ils au-delà? Présentent-ils un rapport d’impact, font-ils vérifier leurs données par un organisme indépendant?

Les piliers d’impact sont-ils gravés dans le marbre ou évoluent-ils dans le temps?

Pascal: S’attaquer aux défis environnementaux et sociaux n’est pas une tâche à court terme. C’est une question structurelle. Par exemple, les objectifs de zéro émission nette ne seront atteints que dans plusieurs décennies. Nos piliers d’impact ont toujours été fondamentalement les mêmes qu’aujourd’hui. Ce qui évolue, ce sont les technologies et les opportunités d’investissement que nous identifions dans le cadre des piliers d’impact. Nous nous y adaptons pour que nos clients puissent prospérer dans des environnements en constante mutation. On pourrait dire qu’il s’agit d’un processus d’optimisation. Pour vous donner un exemple, l’éclairage LED était une technologie nouvelle il y a quelques années. Mais aujourd’hui, c’est devenu la norme en matière d’éclairage, et nous ne nous y intéressons donc plus beaucoup, car cette technologie est bien établie et offre moins de perspectives en termes d’impact et d’investissement. À l’avenir, l’hydrogène vert est une technologie qui pourrait avoir un impact et qui est sur le point de devenir compétitive dans diverses applications. C’est pourquoi nous avons recentré notre action et commencé à investir dans cette technologie.

Si vous avez d’autres questions auxquelles nous n’avons pas répondu ici, n’hésitez pas à contacter l’un de nos représentants locaux.

Par Marco Lenfers, Client Portfolio Manager & Pascal Dudle Head of Listed Impact, Senior Portfolio Manager.

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